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Amitiés funéraires 

 

L’herbier et la photographie agissent comme un défi au temps.

La pratique photographique est étroitement liée à la mort, dans son histoire (pour ne citer qu’un exemple, l’autoportrait

« Noyé-suicidé » d’Hippolyte Bayard) et dans son expression (« tirer » en français, « to shoot » en anglais, « schießen »

en allemand, « tirar » en espagnol, le « einstellung » de Wenders). C’est comme un coup d’arrêt porté au temps

qui passe. 

Depuis plusieurs années, je prélève des plantes sur les tombes pour créer une palette végétale avec laquelle je mets

en lumière des amitiés réelles et fictives. 

.

Funeral friendships 

 

The herbarium and photography act as a challenge to time.

The practice of photography is closely linked to death, both in its history (to cite just one example, Hippolyte Bayard's

self-portrait "Noyé-suicidé") and in its expression ("tirer" in French, "to shoot" in English, "schießen" in German,

"tirar" in Spanish, the Wenders' "einstellung"). It's like a pause in the passage of time. 

For several years now, I have been taking plants from graves to create a plant palette with which I highlight real

and fictitious friendships. 

photo art daguerre freud herbarium grave joelle bolloch

Images latentes (Latent images)

Louis Daguerre (1787-1851) Cimetière communal, Bry sur Marne, France

Sigmund Freud (1856-1939) Golders green cemetery, Londond, England

Tirage bayté, 30x24 cm

2016

photo art tzara breton surrealistes joelle bolloch

Cadavre-exquis (Exquisite corpse)

Tristan Tzara (1896-1963) Cimetière du Montparnasse, Paris, France

Benjamin Perret (1899-1959) Cimetière des Batignolles, Paris, France

André Breton (1896-1966) Cimetière des Batignolles, Paris, France

Tirage bayté, 30x24 cm

2016

photo art funeraire brassai joelle bolloch

Choses vues (Thing seen)

Jean-J. Le Verrier (1811-1877) Cimetière du Montparnasse, Paris, France

Brassaï (1899-1984) Cimetière du Montparnasse, Paris, France

Henri Alekan (1909-2001) Cimetière du Montparnasse, Paris, France

Tirage bayté, 30x24 cm

2016

photo blake jim morrison grave joelle bolloch

Les Portes de la perception (The Doors of perception)

William Blake, cimetière Bunhill Fileds, Londres

Jim Morrison, cimetière du Père-Lachaise, Paris

Tirage bayté, 30x24 cm

2016

photo art funeraire indigents joelle bolloch

Les indigents (The indigent poor)

Tirage bayté, 30x24 cm

2016

photo algues francis halle krajcberg
photo algues francis halle herbier
photo exposition francis halle krajcberg

Exposition Art & Nature avec Francis Hallé

Commissaire Linda Seng Mealy

Centre d'Art contemporain Frans Krajcberg, Paris, 2016

Joëlle Bolloch

Chargée d’études documentaires au Musée d’Orsay et commissaire d’expositions

« Post Mortem », Photo Poche n° 112, Actes Sud, 2007

« La Photographie après décès : pratiques, usages et fonctions », catalogue exposition Musée d’Orsay, Paris, 2002, Editions RMN

Amitiés funéraires (2017)

Dans les œuvres qui composent la série Amitiés funéraires, il est toujours question de végétaux et de photographie. 

Cette fois les végétaux n’ont pas été récoltés sur les rivages mais dans les cimetières. Il s’agit de plantes qui poussent

sur des tombes, ou tout contre elles quand le minéral est le plus fort. Les tombes ne sont pas choisies au hasard.

Marc Bellini a établi au préalable une sélection de femmes et d’hommes dont l’œuvre, ou simplement l’existence,

ont laissé en lui une empreinte constitutive de ce qu’il est. Puis il a cherché leur sépulture, à travers les cimetières proches ou lointains. Chaque élément - fleur, brin d’herbe, feuille - est associé à la personne correspondant à la tombe, et devient en quelque sorte son portrait, sa fiche d’identité. Ainsi pour George Méliès qui figure dans deux planches - Illusions, incluse dans cette série Amitiés funéraires, et Voyage dans la lune de la série Fantasmagories – l’artiste utilise la même petite tige porteuse de quelques feuilles, recueillie au cimetière du Père Lachaise, qui devient l’identifiant du cinéaste. 

Marc Bellini établit des correspondances entre les végétaux en fonction d’affinités, réelles ou supposées.

Le premier assemblage a été intitulé Images latentes, il associe deux inventeurs : Louis Daguerre, considéré comme

le père de la photographie en France, et Sigmund Freud, le père de la psychanalyse. Cette association fait écho à deux centres d’intérêt fondamentaux pour l’artiste : les images révélées par les procédés photographiques lui sont chères

et celles que la psychanalyse aide à mettre à jour évoquent le métier de ses parents, psychanalystes. 

Si la rencontre entre Daguerre et Freud n’a bien sûr pas pu se produire, le second étant né après la mort du premier,

celle entre Tristan Tzara, Benjamin Péret et André Breton a bien eu lieu au sein du groupe surréaliste.

La planche consacrée aux Cadavre exquis marie cette amitié artistique aux goûts littéraires revendiqués par Marc Bellini. 

The Doors of perception est le titre d’un des ouvrages les plus célèbres d’Aldous Huxley qui lui a été inspiré par un poème de William Blake : “If the doors of perception were cleansed, every thing would appear to man as it is, Infinite.”

A son tour Marc Bellini emprunte la formule pour intituler la composition de végétaux récoltés sur la tombe du poète

et sur celle du musicien et chanteur Jim Morrison. 

Marc Bellini a longtemps travaillé dans le milieu du cinéma et du spectacle vivant. Les trois personnages regroupés dans Illusions - le prestidigitateur et directeur de théâtre Emile Isola, le cinéaste Georges Méliès et l’écrivain argentin Adolfo Bioy Casarès, auteur du roman L’Invention de Morel, l’un des bijoux de la littérature fantastique - évoquent cet univers familier

à l’artiste. 

En marge des planches consacrées à des personnes célèbres, Marc Bellini a tenu à faire figurer dans son panthéon

des inconnus, qui ne se sont sans doute jamais rencontrés de leur vivant mais que leur condition de miséreux, d’esseulés, a rassemblés après leur mort. C’est dans la région parisienne, au cimetière de Thiais, dans le carré dit des Indigents

qu’il a collectés les végétaux à l’aide desquels il les évoque. Sa démarche est proche de celle qu’il adopte

dans Les Eaux sombressortir les oubliés de l’oubli ... auquel la violence de la société les a condamnés. 

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